Si vous avez un bon coup de fourchette
ou que vous n'avez pas eu la possibilité de vous sustenter depuis un certain
temps, vous pouvez venir tester les limites d'ingérence de pizza de votre
estomac au bien-nommé restaurant Troppa pizza!
Effectivement, pour la modique somme de
treize euros, vous pouvez profiter de pizzas à volonté accompagnées d'un verre
de boisson au choix, et finir avec un café bien senti. En cas de grosse soif,
vous pouvez opter pour le menu à dix-huit euros qui donne le droit à une chope
d'un litre de Coca-cola, Fanta ou bière.
Le principe de l'enseigne est simple :
chaque table dispose d'un cube vert signifiant ainsi que les serveurs peuvent
continuer à nous proposer des tranches de pizzas de différentes variétés, cube
que l'on tourne au rouge une fois qu'on ne se sent plus l'âme d'engloutir quoi
que ce soit.
Étant moi-même amateur de « binge
eating », ce restaurant m'apparaissait donc comme un endroit rêvé.
Cependant, et à contrecœur, je me sens obligé d'ajouter quelques bémols à ce
tableau idyllique. Tout d'abord, le monde; le local, pourtant de taille
respectable, était bondé et j'ai dû attendre pour avoir une table pour deux
personnes car j'avais commis l'erreur de ne pas avoir réservé avant. Mais il
faut dire aussi que c'était un samedi soir.
Deuxièmement, le bruit et le service
plutôt pressant des serveurs. Si vous avez l'intention de passer une soirée en amoureux
avec l'élu de votre cœur, oubliez – si ce n'est déjà fait - Troppa pizza; on
s'entend à peine parler à cause du trop-plein de personnes et on doit tendre
l'oreille pour écouter les annonces des serveurs et crier notre acceptation ou
notre refus. Le serveur à peine parti, on a le droit trente secondes plus tard
à une autre proposition par un autre employé et le même manège recommence. Vous
l'aurez compris, on est loin du dîner romantique aux chandelles ou du repas tranquillement
pris dans une petite trattoria.
Troisièmement, la situation
géographique. Le local est mal desservi par les transports en commun : situé au
22 via Carlo Torre dans le sud de Milan, on doit prendre la ligne verte du
métro et marcher une dizaine de minutes ou bien monter à bord de plusieurs
tramways avant d'y accéder.
Et enfin, last but not least, les
pizzas elles-mêmes. Malheureusement, les variétés de pizzas ne sont pas celles
que l'on rencontre normalement dans le commerce : ici, pas de napolitaine ou de
quatre saisons mais que des margheritas
garnies à chaque fois d'ingrédients différents. Pourquoi pas, me direz-vous,
mais le problème est que ce stratagème se voit gros comme une maison et quand
on se voit servir une margherita avec
une petite frite dessus en guise de pizza
speciale con patatine fritte, on ne peut s'empêcher d'éprouver une légère
déception. Quelques fois, les goûts sont même vraiment spéciaux (qui a envie
d'une pizza garnie de pesto et d'anchois ?) et n'arrivent pas à la cheville des
pizzas habituelles. Un autre point négatif que je pointerais est la main lourde
de leurs pizzaiolos sur l'huile. Les pizzas dégoulinent de matières grasses et
se révèlent donc moins appétissantes à partir de deux-trois tranches et
carrément bourratives à partir de la quatrième.
En résumé, tout n'est évidemment pas
noir dans ce restaurant. Ses avantages sont le prix, les variétés de pizzas
proposées et le fait qu'on en ressorte obligatoirement repus. Mais ils peinent
à contrebalancer les inconvénients que constituent le monde excessif, le bruit,
les serveurs pressés qui ne nous laissent pas souvent en paix, le manque de
desserte par les transports en commun, et les pizzas parfois au goût douteux.
Somme toute, je conseillerais cette adresse, mais à condition d'habiter assez
près pour ne pas passer du temps dans les transports, d'aimer manger à foison
et surtout d'y aller à un moment où le restaurant est moins débordé, un lundi
soir à onze heures par exemple (il ferme à une heure du matin).
Stéven Morand